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Édito

Edito

Sabine de Ville, présidente du CA de Culture & Démocratie à Bruxelles

Nicolas Roméas, Directeur de l’Insatiable à Paris

18-10-2016

« Vive le débat, l’échange et les désaccords productifs! Mais pour que nos actions publiques aient vraiment du sens et soient utiles au temps présent, il est indispensable qu’elles soient le fruit d’un projet collectif, organisé et construit autour d’une pensée commune, clairement assumée à plusieurs, jusqu’au bout, dans un climat de solide complicité et de responsabilité partagée».  Cet extrait du blog de Nicolas Roméas, directeur de Cassandre/Horschamp, daté de mai 2016 résume les raisons pour lesquelles Culture & Démocratie se lance dans l’aventure d’une publication partagée.

La rencontre entre nos deux associations s’alimente de la convergence de nos points de vue en matière de réflexion sur l’art, la création, la culture et la société. Nous partageons nombre de réflexions et d’analyses, de questions et d’inquiétudes. Nos points de vue sont à la fois proches et singuliers. Nous questionnons ce qui se joue, se construit et se déconstruit politiquement, socialement, humainement, dans les lieux de création et de culture y compris les plus improbables. Et pour ce qui est de ce premier numéro d’Archipels, nous examinons avec nos compagnons de Cassandre/Horschamp comment la création s’empare de la question de l’exil et comment les exilés eux-mêmes s’emparent de la création.

Notre rencontre est revigorante. Elle oblige à nous interroger sur nous-mêmes, elle nous stimule, elle éclaire ce qui nous est spécifique et ce qui nous est commun. Chacun s’en enrichit. Cette rencontre et la publication qui en résulte concrétisent l’espoir d’une action et d’une parole plus fortes et plus utiles au temps présent, comme l’écrit Nicolas Roméas. Car en ce temps plein de vociférations et de violences, de plus en plus, la parole de ceux qui parient sur le lien, la diversité et la dignité est étouffée.

Ce premier numéro sera, nous l’espérons, suivi d’autres. L’aventure prétend, en effet, se poursuivre et s’élargir en fédérant autour de Cassandre/Horschamp et de Culture & Démocratie d’autres partenaires. Le combat est rude, nous ne serons jamais trop pour le mener.

Sabine de Ville Présidente de Culture & Démocratie – Bruxelles

 

Nous avons rencontré beaucoup de gens dans le monde de l’édition culturelle depuis 1995, date à laquelle Cassandre naquit à Paris dans le but de mettre en lumière une action artistique trop souvent négligée. Mais dans cet univers très spécial où l’on s’intéresse à des choses qui ne rapportent rien – rien d’autre que le sentiment d’accomplir une mission importante –, les authentiques acteurs sont peu nombreux, car cela demande de la foi, du courage et, bien sûr, un certain désintéressement. Cette marge (celle qui fait tenir le cahier, dit Godard), où se regroupent ceux qui s’intéressent de près à ce qui est essentiel dans l’art, son rôle dans l’évolution politique du monde, n’est, de fait, pas un lieu de gloire, de pouvoir ou d’argent.

Elle échappe donc évidemment – spécialement dans ce vieux royaume de France – aux féodalités et aux carrières du monde qu’on dit de la Culture. Ses protagonistes sont avant tout des militants, quelque chose comme des moines-soldats, non des courtisans ou des princes. Il leur faut des qualités rares, une curiosité inlassable, un goût de l’aventure, un intérêt sincère pour ce qui est méconnu, un rejet des mondanités. Nous avons rencontré une équipe où ces qualités sont vraiment cultivées. Il nous a fallu passer la frontière qui nous sépare d’un pays où notre langue est partagée (mais où les mœurs sont paradoxalement beaucoup moins monarchiques) pour trouver de vrai·es sœurs et frères de croyance et d’action. Cela fait longtemps que nous entretenons un fructueux dialogue avec Paul Biot, capitaine de frégate modeste et passionnant, l’un des fondateurs du Mouvement du Théâtre Action et l’un des piliers de Culture & Démocratie, puis nous avons fait connaissance avec les autres membres de ce bel équipage, des gens de grande qualité comme Sabine de Ville, Roland de Bodt, et nous avons rencontré la vaillante jeune garde, Maryline le Corre, Baptiste De Reymaeker et Hélène Hiessler. Et nous avons compris qu’au-delà de l’actuelle désespérance européenne quelque chose de très important se transmet d’une génération à l’autre, qui permet de ne pas perdre espoir. Si nous voulions nous ouvrir sur l’Europe (et c’est indispensable), c’est avec eux qu’il fallait le faire, sur ce beau bateau nommé Archipels qui prend son essor sous vos yeux.

Nicolas Roméas Directeur de Cassandre/Horschamp – Paris