« À titre indicatif, malgré un progrès depuis 2000, seuls 25% des élèves belges francophones de 4ème primaire ont une maîtrise élevée de la lecture littéraire ou documentairen. Un communiqué de presse de février 2015, publié par le cabinet de la ministre de l’Éducation Joëlle Milquet précise en outre qu’environ 15% des jeunes quittent l’école secondaire sans diplôme et sans l’usage fonctionnel de la lecture. »
« Un jour, son codétenu lui prêta un livre. Il commença la lecture en buttant sur des phrases trop compliquées, mais il s’obstina. Et il découvrit un autre monde. »
« Nous aurons des livres à venir. Nous aurons des livres à lire. Nous ne manquerons donc de rien. »
Extraits tirés des contributions de ce Journal consacré à la lecture comme pratique culturelle : ce que la lecture cultive… et ce qui ne peut se cultiver – au sens d’une terre travaillée et ensemencée – quand la lecture n’est pas.
Il faut dénoncer ce scandale : 25% seulement des enfants francophones sortant de 4ème primaire ont un degré élevé de maîtrise de la lecture littéraire et documentaire, et 15% des adolescents quittent l’école sans diplôme et sans l’usage fonctionnel de la lecture.
Scandale car le droit reconnu par la Constitution belge à chaque citoyen de participer à la vie culturelle est bafoué comme l’est celui de participer à la vie démocratique. Comment prendre place dans une société fondée sur l’écrit si l’accès à la lecture est fragile voire impossible ? Comment s’informer de ses droits et de ses devoirs ? Comment, au-delà de la dimension citoyenne, partager avec ceux qui les goûtent les joies de la lecture, l’imaginaire, l’émotion, le frémissement, les rires, les pleurs, le/les savoir(s) ?
Ce Journal, dont le sujet peut sembler léger au regard de l’actualité politique, touche pourtant à l’essentiel. Ceux et celles qui arrivent aujourd’hui de Syrie ou d’ailleurs le savent. Ils s’appliquent à maîtriser la langue du pays qui les accueille ou cherchent avec une irréductible obstination à gagner la Grande-Bretagne parce qu’ils maîtrisent l’anglais. Parler certes, pour communiquer, mais lire aussi, pour maîtriser son existence. L’école installée dans la jungle de Calais et récemment évoquée dans notre Lettre, n’avait d’autre fin que de construire cette compétence essentielle.
Au-delà, et ce Journal en rend bien compte, l’expérience de la lecture littéraire est une expérience de l’émancipation et de l’altérité. Il s’y construit une relation singulière à soi-même et au monde, une capacité à stimuler à l’infini son imaginaire et sa réflexivité. Une aptitude à s’ouvrir au différent et à récuser les dogmes de tous types. Un antidote à l’enfermement des esprits dont nous venons de mesurer dramatiquement les effets dévastateurs.
À l’heure où le numérique et la créativité citoyenne transforment – bien différemment – les pratiques de lecture, il est plus que temps de donner à tous, dès l’enfance, une compétence telle qu’ils puissent exercer leurs droits et devoirs de citoyens. Qu’ils puissent aussi choisir de faire ou non de la lecture, pour leur seule satisfaction, une pratique culturelle familière et nourricière.
« PIRLS 2006 International Report », p. 37.
