Benjamin Monteil
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Dossier

Je bâtis à roches mon langage

Entretien avec Paula Almirón, chorégraphe
et Wouter De Raeve, artiste multidisciplinaire

19-11-2021

Comment crée-t-on des espaces et langages différents ? Comment laisse- t-on émerger des lieux à partir de leur écosystème propre ? C’est dans la pratique de la danse comme espace de rencontre, d’échange, d’absorption et de collaboration que Paula Almirón et Wouter De Raeve ont décidé de se lier. Avec plusieurs groupes d’habitant·es du Quartier nord de Bruxelles, les deux artistes tentent d’explorer la possibilité d’un espace qui reflète la géographie du quartier et les « invisibles » des plans d’urbanisme. Le projet « I Build My Language With Rocks », guidé par l’un de ces invisible, prend place autour du marais enseveli sous l’asphalte pour permettre la construction de la ville. À travers leur recherche, il ne s’agit pas de créer des relations harmonieuses, mais bien d’accueillir et/ou révéler la complexité des multiples couches qui composent nos territoires.

Propos recueillis et traduits de l’anglais par Hélène Hiessler, coordinatrice à Culture & Démocratie

 

Avant tout, pourriez-vous expliquer votre pratique et comment vous en êtes venu·es à travailler ensemble ?

Paula Almirón : Je suis basée à Bruxelles depuis 5 ans. Je suis danseuse et chorégraphe, et je travaille aussi avec l’écriture collective, chorégraphique ou textuelle. Je m’intéresse à la notion de mouvement. La manière dont nous la comprenons est très centrée sur l’humain ou l’animal. Une partie de mes travaux interrogent ce que signifie être actif·ve ou passif·ve, et comment intégrer la décroissance ou la décomposition afin d’élargir notre compréhension du mouvement en tant que tel et de la temporalité humaine. En explorant différentes forme d’interactions entre des forces non humaines et des pratiques d’écriture, qu’elle soit textuelle ou chorégraphique, je me suis peu à peu rapprochée du genre littéraire de l’écofiction. Je ne suis pas du tout versée dans les récits écologiques post-apocalyptiques ou hyper moralisateurs, comme le sont beaucoup d’écrivain·es de ce champ littéraire, mais plutôt dans l’écofiction en tant que genre − l’attention prêtée aux récits non humains, la tentative de saisir le territoire non comme le socle des activités humaines mais plutôt comme un agent en soi, un personnage porteur d’agentivité. Une grande part de mes travaux, écrits ou chorégraphiques, sont traversés par ces préoccupations. Dans « Always coming hole », je m’efforce de concevoir le phénomène de la disparition d’un lac d’Amérique du Sud comme chorégraphie plutôt que comme une catastrophe naturelle.
Partir d’une conception élargie de la chorégraphie pour retourner vers le mouvement humain, vers la danse. Et de fil en aiguille je me suis mise à travailler autour de l’espace, à tenter d’utiliser la chorégraphie comme un outil d’exploration de différentes manières d’être (dans) l’espace. Avec Wouter, nous avons d’abord partagé une pratique physique, puis nous avons commencé à échanger sur notre rapport à l’espace. C’est en partie comme ça que notre projet en commun est né.

Wouter De Raeve : Ma relation à Bruxelles et la question de l’évolution de la ville ont été une balise importante de mon orientation vers ma pratique actuelle. Je m’y sens très relié. Ma pratique est très multidisciplinaire : chaque questionnement induit sa propre méthodologie. Mais cela a toujours à voir avec la manière dont l’espace et la ville de Bruxelles évoluent. Puis viennent différentes sous-questions. Mes travaux ont abouti tantôt à des publications, tantôt à des expositions. Plus récemment je me suis surtout intéressé aux rapports de force entre les différent·es acteur·ices impliqué·es dans la création d’espace, au départ d’une position très critique à l’égard des pratiques spatiales contemporaines − en particulier les pratiques en matière d’architecture, d’urbanisme, etc. Ce qui m’a frappé en premier c’est la vision très conventionnelle et unidimensionnelle qui prédomine en la matière. Tenter de trouver d’autres approches de la création d’espace est un élément central de mes recherches.
En 2020, Lietje Bauwens et moi avons réalisé le film WTC A Love Storyn. Nous avons un temps occupé un studio dans les tours du WTC, et nous avons pu observer de près les rapports entre les différent·es acteur·ices, qui peut décider comment l’espace sera créé, et qui ne le peut pas − devenant ainsi victime, d’une certaine manière, de la décision des autres. Avec ce projet j’ai vraiment plongé dans les questions qui se posent au Quartier nord, et c’est dans ce contexte que j’ai rencontré Paula. Je travaillais surtout sur les problématiques sociales dans le Quartier nord, et Paula davantage sur les acteur·ices non humain·es qui sont aussi négligé·es dans la création d’espace. On s’est trouvé·es, en quelque sorte, et c’est comme ça que ce nouveau projet est né.

P. A. : Beaucoup de questions ont émergé autour de l’espace intime, de l’espace qu’on partage, de l’espace qu’on peut créer ensemble ou avec lequel on n’est pas d’accord. Notre projet s’est donc construit autour de la question « Comment peut-on créer différemment un espace ? » On cherche à faire émerger une pratique physique collective de groupes de personnes qui vivent ou traversent le Quartier nord, en acceptant sa complexité et en faisant de la place à différentes approches. Dans le quartier, il y a de nombreux projets participatifs qui demandent aux habitant·es « Qu’attendez-vous du quartier ? » ou « Que devrait être ce quartier selon vous ? » pour ne finalement pas tenir compte de leur opinion. Alors nous nous sommes dit : pas d’objectif fixe, contentons-nous de voir d’abord comment on peut se rencontrer à travers le corps.

 

Dans le contexte de la distanciation sociale, de l’interdiction de la danse, cette approche prend un sens particulier, notamment pour tou·tes celles et ceux qui ont été privé·es de contact humain.

P. A. : Certainement. Nous avons imaginé ce projet avant la pandémie, et nous avions déjà commencé à contacter les associations du quartier qui collaborent avec nous. Nous avons dû attendre longtemps avant de commencer, mais maintenant c’est en train de prendre forme. Les associations du quartier n’ont maintenu que très peu d’activités pendant cette période, l’isolement des gens était immense. On n’en est qu’aux débuts. Nous voulions rassembler un groupe hétérogène mais pour l’instant c’est encore impossible, alors nous travaillons en « bulles ». Nous tentons d’accepter la situation et de trouver des stratégies alternatives pour créer du collectif, entre et à l’intérieur des groupes. Par exemple, nous avons eu quelques sessions à De Harmonie, un centre pour personnes âgées, et nous sommes resté·es en cercle, à bonne distance, mais il était évident que ces corps avaient grand besoin d’interaction (c’était la première activité à laquelle il·elles participaient depuis le début de la pandémie). C’est très intéressant de voir comment les sessions sont modelées par les corps en présence.

 

Vous dites que ce projet est « traversé par la base géologique de Bruxelles, le marais ». Comment cette inspiration se traduit-elle dans votre pratique?

W. D. R. : Pendant quelques années, Lietje Bauwens et moi avions travaillé sur cette idée du marais, qui était présente dans le projet « The New Local » place de la Monnaie. Si on pense aux acteur·ices opprimé·es de Bruxelles, à plus d’un titre, le premier d’entre eux·elles pourrait bien être le marais, qui a été enseveli sous l’asphalte pour faire place à la construction de la ville. Cet élément a pris beaucoup d’importance dans nos conversations avec Paula, et c’est quelque chose que nous aimons mobiliser aussi bien sur le plan conceptuel que dramaturgique. Dans le Quartier nord, les « acteur·ices opprimé·es » sont les éléments naturels ou géologiques − tels que le marais − et toutes les personnes qui ne sont pas prises en compte dans le développement de la ville. Dans notre projet le marais nous sert d’outil dramaturgique plutôt que d’élément concret avec lequel on travaillerait lors des sessions.

Un petit groupe de gens se trouvent en position de projeter leurs propres besoins, leur mode de vie, leur propre vision de ce que la société devrait être sur ce territoire, et les personnes qui vivent sur place n’ont plus qu’à l’accepter, à s’adapter ou à en être écartées.

P. A. : La façon dont on crée l’espace détermine une réalité sociale, des énergies, frictions et rencontres spécifiques. Et vice versa : des conditions sociales spécifiques créent aussi des espaces spécifiques. Nous nous sommes dit, et si nous invitions le marais comme compagnon de pratique ? Pas pour écrire à son sujet ou le travailler tel quel, mais plutôt dans l’idée d’en faire un allié, toujours en filigrane, et de le voir comme un aspect à part entière des relations sociales qui font le quartier. Et si nous nous laissions guider par la métaphore du marais − une écologie multiple et complexe, un espace qui résiste à sa propre réduction, au tracé, constamment en transition − pour reconnaitre la réalité sociale complexe du quartier au lieu de l’effacer ou de la réduire comme le font les processus de gentrification − opprimer, homogénéiser puis écarter ou contrôler ? À présent que l’espace pour la réalité sociale du quartier se ferme, et si on ouvrait un espace qui tente de la mettre en avant ? Il ne s’agit pas de travailler sur le marais mais plutôt de voir comment le marais peut inspirer une pratique, un rapport à l’espace.

 

Quand vous parlez de « création d’espace », à quels types d’espaces faites-vous référence ?

P. A. : Dans ce projet, l’idée d’espace est assez ouverte − ce qui est en soi un parti pris politique. Le terme « espace » a des significations multiples. Ça commence par l’espace interne, le mouvement interne, puis il y a l’espace entre deux corps, celui qu’un groupe peur créer − par le mouvement entre les corps, et la relation entre les corps et l’espace, etc. Un espace peut être fictif, symbolique, exister chaque mercredi à 14h − on se rencontre et de là nait un espace qui devient une pratique. Pour nous, la pratique en soi est un espace. Un espace existe parce que nous nous réunissons chaque semaine pour l’habiter ensemble − y créer des habitudes, différentes manières de se lier et d’échanger. Il ne s’agit pas d’inviter des voisin·es à devenir les architectes de la ville, mais plutôt d’une réflexion sur ce que l’espace signifie pour chacun·e de nous. Et puis il y a la seconde étape du projet, la question : à quel point tout cela peut-il intervenir dans le débat sur le développement urbain ? Est-ce que cela a même vocation à devenir concret ?

W. D. R. : Mon travail est très critique du type de relations qui prédomine dans le contexte de pratiques spatiales telles que l’architecture : elles sont toujours une projection de besoins et d’ambitions sur le territoire, et ensuite, toutes sortes d’outils sont créés pour les réaliser en ignorant les récits et les interactions qui préexistent. Il s’agit rarement de créer un espace pour ce qui existe déjà. Cette démarche devrait s’appeler « projection d’ambitions » plutôt que « création d’espace » ou « pratique spatiale ». Malheureusement, c’est une approche récurrente, et le Quartier nord en est emblématique. Dans les années 1960, les Charly de Pauw et consorts pouvaient littéralement faire ce qu’ils voulaient. Et aujourd’hui, une fois encore, un petit groupe de gens se trouvent en position de projeter leurs propres besoins, leur mode de vie, leur propre vision de ce que la société devrait être sur ce territoire, et les personnes qui vivent sur place n’ont plus qu’à l’accepter, à s’adapter ou à en être écartées. Quant à la nature, sous les pavés, elle est bien forcée de suivre.

 

Votre projet s’appelle « I Build My Language With Rocks » : pourquoi ?

P. A. : C’est une citation d’Édouard Glissant (« Je bâtis à roches mon langage »), qui parle beaucoup de la manière dont un certain langage peut émerger d’un territoire ou d’un espace spécifiquen. C’est en partie ce que l’on recherche dans notre pratique. Si une rencontre, un certain type de regroupement se répète, un langage spécifique peut-il en émerger ? En contraste avec les approches classiques, top-down, de développement de la ville − qui sont pratiquement la recette de la gentrification appliquée à tant de quartiers, au-delà du seul Quartier nord −, peut-on inverser cela ? Comment un langage architectural ou spatial pourrait-il émerger du territoire lui- même ? Le « je » est à comprendre comme un « je » collectif, comme un « nous », et les roches fonctionnent aussi comme métaphore de l’élément géologique et de la construction de la ville.
Dans Poétique de la relationn, Édouard Glissant dresse la liste de différents types de connaissance. Parmi eux, la connaissance appropriation, la connaissance absorption, la connaissance partagée, la connaissance mutuelle. Une chose qui est importante pour nous est de ne pas romantiser les relations dans le quartier, ne pas faire comme si tout le monde était uni, vivant en harmonie, etc. Nous sentons que le Quartier nord n’est pas du tout comme ça, pas plus que la nature humaine. Je vois aussi un lien entre l’idée du marais comme lieu hétérogène et celle de multiples types de relations sans résultat linéaire. C’est une autre manière de ne pas réduire la complexité, ce que Glissant nous rappelle, la possibilité de ne pas être entièrement compris·e, de ne pas être réduit·e à quelque chose d’unique, la possibilité de rester opaque. Alors évitons l’unique proposition d’un groupe harmonieux de voisin·es, et essayons plutôt de faire la place à plusieurs approches différentes dans le même espace.

 

La pandémie a-t-elle changé quelque chose à la manière dont vous conceviez votre projet ?

P. A. : « I Build My Language With Rocks » n’est clairement pas une production. C’est plutôt un processus, ça demande du temps, du temps de fermentation. La pandémie nous a offert du temps supplémentaire, elle nous a réconcilié·es avec l’idée de lenteur.

W. D. R. : Dans les pratiques spatiales aujourd’hui, il s’agit toujours d’aller très vite. On organise cinq ateliers, voilà, on sait tout et hop, on démarre le chantier ! C’est intéressant pour nous de prendre conscience que même en essayant de procéder autrement, on allait déjà assez vite avant d’être forcé·es de ralentir. Mais pendant ce temps, la réalité sociale du quartier n’a pas ralenti, elle : certains problèmes se sont accentués et ont été accélérés, et c’est terrible. La pandémie a servi de prétexte pour chasser les migrant·es de façon très violente, pour les repousser vers le canal et au-delà, loin de la gare du Nord et du parc Maximilien. Dans les bâtiments de logements sociaux, la situation a aussi empiré. Nous disons ne pas avoir d’ambition pour ce projet mais nous avons bel et bien une préoccupation politique.
Pendant le tournage du film WTC A Love Story, j’étais tous les jours au parc Maximilien, et je rencontrais beaucoup de personnes, migrant·es et habitant·es des logements sociaux − certaines qui sont devenues des ami·es, ou bien de simples connaissances mais avec qui j’interagissais quotidiennement. Ce sont ces rencontres quotidiennes qui font un quartier, et au départ de notre projet avec Paula, elles étaient une grande motivation pour moi.

 

Cette dimension collective de l’espace public, était-elle fort présente avant la pandémie ?

WD. R. : Même si rencontrer de nombreuses personnes était plus facile avant la pandémie, le Quartier Nord avait déjà grand besoin de lieux de rencontres en dehors de l’espace public, car l’espace public peut être lui-même excluant : tout le monde n’est pas en mesure de se l’approprier ou de s’y sentir en sécurité.

P. A. : C’est un long processus et nous n’avons pas encore toutes les réponses. Essentiellement nous essayons d’explorer ce qui est possible, quand et comment. Nous essayons d’être à l’écoute de ce qui est là, sans imposer notre propre idée de ce que veut dire « collectif ».

W. D. R. : Pour revenir au débat sur les pratiques spatiales en tant que telles : le gouvernement parle du quartier comme si c’était un quartier mort, comme s’il n’y avait rien et qu’il allait y créer de la vie. Qu’est-ce qui lui permet de parler ainsi ? C’est en partie parce qu’il n’y a pas d’intense vie associative sur place. Dans les Marolles par exemple, il y a une dynamique associative très forte. Dans le Quartier Nord, elle est systématiquement détruite. Et la pandémie a accentué cela. Du coup, trouver des participant·es au projet nous demande un gros effort, mais c’est aussi déjà un acte important en soi dans la logique de notre pratique. C’est vraiment un processus dont on ne sait pas clairement à quoi il aboutira − nous n’avons pas d’obligation de production, comme une pièce de théâtre à une date donnée, ou un nombre déterminé de répétitions. Nous avons l’espace et le temps de mener ce projet, et nous nous efforçons de rester humbles dans nos attentes, d’y aller pas à pas, sans trop anticiper.

 

La pandémie a-t-elle changé quelque chose à la manière dont vous conceniez votre projet ?

P. A. : « I Build My Language With Rocks » n’est clairement pas une production. C’est plutôt un processus, ça demande du temps, du temps de fermentation. La pandémie nous a offert du temps supplémentaire, elle nous a réconcilié·es avec l’idée de lenteur.

W. D. R. : Dans les pratiques spatiales aujourd’hui, il s’agit toujours d’aller très vite. On organise cinq ateliers, voilà, on sait tout et hop, on démarre le chantier ! C’est intéressant pour nous de prendre conscience que même en essayant de procéder autrement, on allait déjà assez vite avant d’être forcé·es de ralentir.

Mais pendant ce temps, la réalité sociale du quartier n’a pas ralenti, elle : certains problèmes se sont accentués et ont été accélérés, et c’est terrible. La pandémie a servi de prétexte pour chasser les migrant·es de façon très violente, pour les repousser vers le canal et au-delà, loin de la gare du Nord et du parc Maximilien. Dans les bâtiments de logements sociaux, la situation a aussi empiré. Nous disons ne pas avoir d’ambition pour ce projet mais nous avons bel et bien une préoccupation politique.

Pendant le tournage du film WTC A Love Story, j’étais tous les jours au parc Maximilien, et je rencontrais beaucoup de personnes, migrant·es et habitant·es des logements sociaux − certaines qui sont devenues des ami·es, ou bien de simples connaissances mais avec qui j’interagissais quotidiennement. Ce sont ces rencontres quotidiennes qui font un quartier, et au départ de notre projet avec Paula, elles étaient une grande motivation pour moi.

 

Cette dimension collective de l’espace public, était-elle fort présente avant la pandémie ?

W. D. R. : Même si rencontrer de nombreuses personnes était plus facile avant la pandémie, le Quartier Nord avait déjà grand besoin de lieux de rencontres en dehors de l’espace public, car l’espace public peut être lui-même excluant : tout le monde n’est pas en mesure de se l’approprier ou de s’y sentir en sécurité.

P. A. : C’est un long processus et nous n’avons pas encore toutes les réponses. Essentiellement nous essayons d’explorer ce qui est possible, quand et comment. Nous essayons d’être à l’écoute de ce qui est là.

W. D. R. : Pour revenir au débat sur les pratiques spatiales en tant que telles : le gouvernement parle du quartier comme si c’était un quartier mort, comme s’il n’y avait rien et qu’il allait y créer de la vie. Qu’est-ce qui lui permet de parler ainsi ? C’est en partie parce qu’il n’y a pas d’intense vie associative sur place. Dans les Marolles par exemple, il y a une dynamique associative très forte. Dans le Quartier Nord, elle est systématiquement détruite. Et la pandémie a accentué cela. C’est vraiment un processus dont on ne sait pas clairement à quoi il aboutira − nous n’avons pas d’obligation de production, comme une pièce de théâtre à une date donnée, ou un nombre déterminé de répétitions. Nous avons l’espace et le temps de mener ce projet, et nous nous efforçons de rester humbles dans nos attentes, d’y aller pas à pas, sans trop anticiper.

 

Image : © Benjamin Monteil

1

WTC A Love Story, Lietje Bauwens et Wouter De Raeve, 60mn.

2

« Je bâtis à roches mon langage », in Édouard Glissant, L’Intention poétique, Gallimard, 1996, p. 49.

3

Édouard Glissant, Poétique de la relation, Gallimard, 1990.

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