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Dossier

Pour une communauté écologique sur les bords de l’Escaut

Lola Massinon, sociologue

08-11-2022

Au sein d’un territoire précis, un cas concret de chocs narratifs, révélateur des paradoxes de l’Anthropocène. Les rapports de force sont portés par les récits dominants : récit extractiviste contre récit de la biodiversité. S’y enchevêtrent les lignes de vie de celles et ceux qui n’ont pas la maitrise de leur imaginaire, faisant partie du paysage, portés par les « traditions », paysan·nes et espèces domestiques. Ainsi sont posés les termes conflictuels à résoudre par une diplomatie narrative qui s’invente peu à peu, garantie d’une future écologie des imaginaires.

Dans l’estuaire de l’Escaut, les récits travaillent la terre, reconfigurent les territoires et le destin d’une multitude d’êtres. Depuis les années 1960, le port d’Anvers a décidé de « décloisonner » les territoires de la rive gauche et de mener une véritable révolution industrielle en étendant ses infrastructures portuaires et pétrochimiques sur des terres jusque-là agricoles, plus précisément des poldersn. Est concerné le fameux village de Doel, aujourd’hui médiatisé comme un « village fantôme » mais où une vingtaine de personnes continuent de vivre, et qui accueille aussi des centrales nucléaires.

Une nature adaptée au capitalisme portuaire
Pour mener à bien ce projet d’expansion continuelle, le port l’accompagne d’un discours économique qui ne laisse pas d’alternative : développer les infrastructures est nécessaire pour accueillir des porte-conteneurs aux tailles toujours plus démesurées, et ainsi rester dans la course du capitalisme mondial. Dès la fin des années 1960 donc, le village de Doel est menacé de destruction, ses habitant·es d’expropriation, les incertitudes commencent au fil des plans d’aménagement et ne sont pas près de s’arrêter. Dans les années 1990, une lutte commence pour la préservation du village. Associations écologistes et comités d’habitant·es font d’abord front commun et parviennent ensemble à arrêter pendant près d’un an le chantier d’un quai à conteneurs – le Deurganckdock − en invoquant une Directive européenne sur les oiseaux. Suite à cela, un basculement s’opère : selon cette directive, si des travaux d’infrastructure importants sont effectués sur des zones de conservation, les terrains perdus doivent être compensés autre part, et les écosystèmes recréés. Ces mesures compensatoires mènent à de nouvelles expropriations dans les villages polders, pour y placer de la « nouvelle nature ». En 2001, l’association écologiste Natuurpunt commence à travailler avec le port d’Anvers pour son projet de « port naturel » et la mise en place des zones de nature. D’autres hameaux sont menacés. En 2005, le Deurganckdock est inauguré en présence du roi.

La sociologue Benedikte Zitouni a montré que plus qu’une opération de greenwashing, le projet de port naturel est une tentative d’intégrer la menace écologique à son expansion capitaliste, ou pour le dire autrement, de travailler à la résilience des terres pour qu’elles puissent supporter toujours plus d’extraction. Par exemple, les zones de nature créées aux abords du port sont des zones humides, capables entre autres d’absorber les métaux lourds et autres particules dégagées par la pétrochimie. Autre exemple : le port participe à creuser de plus en plus l’Escaut pour y faire passer de plus gros porte-conteneurs, ce qui fragilise la zone et accentue les risques d’inondation… mais ces risques sont intégrés par la mise en place de zones naturelles capables de faire tamponn. Les menaces écologiques sont désormais intégrées au capitalisme portuaire et justifient la création de zones entièrement dédiées à la « nature ». Depuis la mise en place de ces zones, l’association Natuurpunt, auparavant compagnonne de lutte des comités d’habitant·es, est devenue une condition permettant l’expansion portuaire. Les agriculteur·ices et habitant·es des polders la voient à présent comme leur ennemie. Les luttes pour la conservation de la nature et de la biodiversité, de cette façon, ont été réifiées comme antagonistes par rapport aux luttes de territoire des habitant·es des polders, le rapport de force face à l’expansion portuaire, quant à lui, est devenu démesuré.

Oiseaux vs terres agricoles
Par ailleurs, les associations écologistes travaillent à remplir des objectifs européens de protection des oiseaux. Cela a rapidement produit ses effets : après avoir enlevé une couche de sol trop polluée par les pesticides, ensemencé des herbes de plusieurs espèces, créé des étangs et des fossés d’eau, placé un fil électrique empêchant les renards de les prédater… les oiseaux tant attendus sont arrivés pour y faire leur nidification. Grâce à un management minutieux des associations, on peut maintenant les observer dans leurs zones dédiées. L’un des discours ayant permis cela est donc à retrouver dans les législations européennes : la nature peut être compensée, recréée autre part. Ces zones naturelles deviennent alors des endroits à contempler, où se promener, profiter de la beauté de la nature.

L’urbanisme bulldozer tente d’effacer les cultures locales de l’arrière-pays d’Anvers, ses fermes et ses socialités rurales.

Ce qui n’est pas de la nature, en revanche, ce sont les champs d’agriculture intensive qui se trouvaient là. La réconciliation semble impossible entre les naturalistes et amoureux·ses de la nature, et les paysan·nes. Après avoir vécu les remous des différents plans d’aménagement, des expropriations, des maisons et des fermes détruites, les habitant·es des polders vivent avec difficulté le travail et le discours des associations écologistes. Chris De Stoop, journaliste né dans la ferme de ses parents au cœur des polders (et auteur du livre Ceci est ma ferme qui raconte son retour sur les lieux après tous les changements évoqués), dit ceci : « C’est aussi terrible pour eux [les paysan·nes] car ils ont toujours eu le sentiment que pendant des générations, ils ont vécu dans et avec la nature. Et maintenant, on vient leur dire que ce qu’ils faisaient, ce n’était pas de la nature, et que ça doit être remplacé par une “vraie” nature. »n Selon lui, la mise en place des réserves naturelles constitue une deuxième vague d’agressions subie par la région des polders.

Cette nouvelle nature vient briser les connexions dans le milieu, les rapports actifs aux entités qui entourent les gens, animaux d’élevage devenant viande, excréments, polders pesticidés, betteraves et machines agricoles, et importe une vision unilatérale de ce que doivent être nos rapports au monde naturel : protection et distance. En revanche, il ne s’agit pas de romantiser l’écologie des polders ou les pratiques des agriculteur·ices : tout cela est à situer dans le cadre d’une agriculture intensive en grande partie destinée à l’exportation et de monocultures rendant les sols bien pauvres. Pendant ce temps, les phénomènes d’extinction d’oiseaux, eux aussi, sont bien réels. Que faire de tout cela, quand le capitalisme portuaire et son pendant écologique posent sur ces situations troublantes une alternative infernale : sauver des oiseaux ou sauver des terres agricoles, des lieux de vie et leurs histoires ? Isabelle Stengers nous disait : « Le piège se refermera dès lors que ceux à qui ces arguments s’adressent accepteront l’interchangeabilité des positions, accepteront le “que feriez-vous à notre place ?”, à une place toujours définie par des principes abstraits qui ratifient le triple ravage écologique. »n

Que penser de la poursuite de principes abstraits tels que la biodiversité s’ils impliquent de faire table rase de ce qui composait des territoires ? Des projets qui, en plus de cela, permettent de traduire la nature en unités isolées, et de garder un équilibre entre la nature détruite par le développement et la nature que l’on conserve… et donc de continuer le développement infernal. Il apparait que ce qu’on appelle en fait « nature » se trouve ici en conflit. Dirk Draulans, biologiste renommé arrivé dans la région des polders il y a plus de quinze ans, incarne un point de vue de naturaliste. Défenseur de la nature depuis son plus jeune âge, il dédie une grande partie de sa vie à la conservation d’espèces en voie d’extinction. Quand il est arrivé sur le polder Putten West, l’endroit était un champ. Petit à petit, la skyline du port s’est installée, pendant qu’on développait aussi la zone de nature au bord de laquelle il se trouve à présent, compensation aux terres utilisées pour le Deurganckdock qui « aide à améliorer la valeur naturelle des polders ici »n, selon ses mots. Dirk Draulans dit que le port au pas de sa porte ne le gêne pas, pas plus que la centrale nucléaire qu’il ne voit même plus. C’est dans cet environnement particulier qu’il vit et observe chaque jour la nature autour de lui, à l’affut des nouvelles espèces qui s’installent. Selon lui, seules les régulations européennes en faveur des oiseaux et de leur habitat ont permis que tout, dans la région, ne soit pas perdu aux mains de l’industrie et de l’agriculture. Pour cette raison, il relativise les expropriations qui ont eu lieu. Ce qui se niche maintenant dans les zones de nature, c’est du jamais vu. En revanche, quand il regarde les paysages des polders et leurs champs de monoculture, il ne voit qu’un désert biologique.

Les regards des un·es et des autres ne voient pas les mêmes choses dans le territoire, et les affects associés semblent créer un fossé. Peut-on imaginer une réconciliation possible, une écologie qui n’est pas basée sur le sacrifice des agriculteurs·trices et habitant·es et ne justifie pas un choix entre une protection de « la nature » et une justice sociale ? Comment prendre soin des terres polluées par le port, épuisées par l’agriculture intensive, sans exclure ? Quand je demande à Brian du collectif Doel2020, qui milite depuis des années pour la survie du village de Doel, comment il définit ce qui est « naturel », il dit ceci : « Ils essayent maintenant tout ce qu’ils peuvent pour retravailler le paysage, et c’est aussi un élément très difficile pour nous à comprendre, parce que le paysage de nos polders, c’est un paysage qui a évolué […] au fil du temps, et c’est comme ça que ça évolue, les choses changent pendant des centaines d’années. Ce qui est naturel est ce qui se fait au fil du temps. À présent, ils disent : “On veut vingt de ces oiseaux dans la zone, ils ont besoin de beaucoup d’eau et de petits buissons.” Mais il n’y a pas d’eau dans notre polder, c’est juste des terres agricoles. Donc ce qu’ils font dans chaque zone qu’ils acquièrent, c’est qu’ils la changent en un paysage qui a de l’eau et de petits buissons, parce que c’est le type de nature qui attire ces oiseaux. Mais ce n’est pas naturel du tout, et c’est pas durable, parce que chaque année, ils doivent maintenir ces zones de nature avec d’énormes camions. […] On s’est assis autour d’une table avec des gens qui ont maintenant le contrôle de la nature dans ma zone, et ils ont une vision très limitée de ce que ça peut être. Si tu laissais ces gens prendre toutes les décisions, je ne vivrais plus ici, parce que je suis une menace pour les oiseaux qui veulent s’installer là. Ma maison ne serait plus là, car les oiseaux ne pourraient plus atterrir parce que ma maison est dans le chemin. Des trucs comme ça. […] Demande à dix personnes : demande à un fermier, quelqu’un d’une association de nature, quelqu’un du port d’Anvers, quelqu’un qui habite là, elles te donneront toutes un point de vue différent sur comment elles définissent la nature dans la zone où on vit. »n

Les manières de raconter les territoires, de parler de la nature, des êtres nocifs ou à garder en vie, conditionnent les évolutions matérielles des polders et les conditions d’existence sur ces lieux.

Pour une « communauté écologique »
Dans son livre Le champignon de la fin du monde, l’anthropologue Anna Tsing amène la notion de « scalabilité ». La scalabilité « exige que ce à quoi elle s’applique soit séparé de toute possibilité de faire histoire, soit rendu amnésique et anonyme »n. La scalabilité permet de générer des projets à grande échelle, c’est la possibilité qu’un cadre de recherche puisse s’appliquer à plus grande échelle sans même devoir changer les hypothèses de départ. Elle précise que ce n’est pas une question de bien/mal, simplement, les projets non scalables sont plus variés. « La scalabilité élimine la diversité tapie entre les lignes, celle-là même qui pouvait bouleverser l’ordre des choses. » Pour Anna Tsing, cette entreprise est à l’origine des rêves du progrès et de la modernité et a transformé nos paysages et notre société.

Je dirais que d’une part, c’est le projet du port, dont le projet de conteneurisation est la standardisation par excellence pour l’efficacité capitaliste, des boites aux mêmes dimensions qui s’acheminent entre des lieux hétérogènes de la planète. Les conteneurs permettent d’éviter les imprévus dans le commerce international en limitant les opérations de manutention entre les passages d’un véhicule à un autre, réduisant du même coup le nombre de dockers nécessaires. D’autre part, pour mener à bien ce projet, il y a le pendant écologique de l’entreprise portuaire, un projet scalable lui aussi : les zones de compensation de la nature doivent pouvoir recréer un même écosystème autre part, comme si les caractéristiques et histoires des milieux ne comptaient pas. L’urbanisme bulldozer tente d’effacer les cultures locales de l’arrière-pays d’Anvers, ses fermes et ses socialités rurales. Celles-là même qui continuent à lutter et restent dans le chemin.

Réconcilier, donc, passerait par autre chose que cela. Pourquoi pas par l’avènement de ce que l’écologie politique appelle une « communauté écologique », où chaque entité serait considérée comme une fin, et non plus comme un moyen ? Où l’on « chercherait à prendre en compte les associations d’êtres qui composent le collectif »n ? Une communauté serait par exemple à faire advenir là où vit Monique, une fermière restée dans la région avec ses vaches, au bord d’une réserve naturelle. Il a été décidé que ses vaches ne pouvaient entrer dans la zone que lorsque les jeunes oiseaux sont capables de voler ; que l’herbe doit être coupée court pour que les oies migratrices y trouvent du fourrage, pas de pesticide, pas d’engrais. Par ailleurs cette zone est humide, composée de schorresn, où parfois les vaches peuvent s’embourber et mourir. La végétation saumâtre qui pousse là peut donner un gout salé aux bêtes qui les mangent mais les eaux sont polluées de métaux qui peuvent se retrouver dans la viande. Prendre en compte la communauté, ce serait prendre en compte à la fois Monique et ses conditions d’existence en tant que fermière expropriée mais qui peut continuer son exploitation tout en cohabitant avec les normes décidées par les associations environnementales, mais aussi ses animaux d’élevage qui doivent s’adapter à un nouvel environnement et les risques qu’ils encourent en allant là. Prendre aussi en compte les consommateur·ices de viande de pré-salé si les vaches se nourrissent dans ces zones polluées. Tout autant que les oiseaux protégés dont on tente d’assurer des conditions de vie acceptables, les solutions mises en place accorderaient de l’importance à tous ces autres êtres pris dans la toile. Elles chercheraient des prises dans le milieu lui-même, prenant aussi en compte les politiques économiques ayant mené à une intensification des pratiques agricoles, pour penser des évolutions possibles. La conservation d’espèces et une utilisation agricole des terres peuvent par exemple se conjuguer à travers une agriculture de type humide, et une plus grande diversité de variétés cultivées dans les maraisn.

On l’aura vu, les manières de raconter les territoires, de parler de la nature, des êtres nocifs ou à garder en vie, conditionnent les évolutions matérielles des polders et les conditions d’existence sur ces lieux. Évidemment, ces récits et discours ne pèsent pas le même poids, émanant tantôt de machines du capital, d’organismes européens ou de personnes s’évertuant à défendre leurs terres ou à garder des traces de leurs histoires.

 

Image : © Joanna Lorho

 

1

Un polder est une terre cultivée, conquise sur la mer (ici sur l’Escaut qui est un estuaire) par endiguement et assèchement. Cette relation à l’eau, le fait d’avoir gagné des terres sur l’Escaut constituent des éléments forts de l’histoire de la région.

 
2

Benedikte Zitouni, « Promises of the New Wetlands » in Bruno Latour & Peter Weibel (dir.), Critical Zones : The Science and Politics of Landing on Earth, MIT Press, 2020.

 
3

Oratorium zonder Doel, documentaire de Manu Riche, 110mn, Riche, Riche & Riche, 2016.

 
4

Isabelle Stengers, « Penser à partir du ravage écologique » in Émilie Hache, De l’univers clos au monde infini, Éditions Dehors, 2014.

 
5

Entretien réalisé par l’autrice.

 
6

Entretien réalisé par l’autrice.

 
7

Anna Lowenhaupt Tsing, Le champignon de la fin du monde. Sur la possibilité de vivre dans les ruines du capitalisme, trad. Philippe Pignarre, Les Empêcheurs de penser en rond/La Découverte, 2017.

 
8

Émilie Hache, Ce à quoi nous tenons : propositions pour une écologie pragmatique, Les Empêcheurs de penser en rond/La Découverte, 2011.

 
9

Partie haute des vasières marines (pré-salé).

 
10

Entretien réalisé par l’autrice avec Tim Soens, historien environnemental.

 
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