Manuel d’approche des Droits Culturels

La première évocation des droits culturels apparaît en 1948 dans la Déclaration universelle des droits de l’homme. Les génocides et les guerres de la première moitié d’un siècle hallucinant de cruautés obligent la communauté des nations à faire advenir « un monde où les êtres humains libérés de la terreur et de la misère seront libres de parler et de croire ». L’article 22 évoque les droits culturels, qui prennent un sens déjà plus précis – ou moins fondamental –, et indique que « la satisfaction des droits culturels est indispensable à la dignité et au libre développement de [l]a solidarité ». Après cette confirmation de l’Homme comme être social, les droits culturels peinent à s’écrire : l’article 27, les définira pour longtemps, comme « le droit de prendre part librement à la vie culturelle », sans autrement préciser ce qui s’entend par « vie culturelle ». Pour cela il faudra attendre la Déclaration de Mexico en 1982. Mais pour l’heure le droit de l’homme en la matière est celui de prendre part.

Le nouveau millénaire va redécouvrir les droits culturels. Chez Culture & Démocratie, ce sera autour des textes de Céline Romainville notamment : Culture et vous ? (2009) et Neuf essentiels pour comprendre les droits culturels (2013). Puis dans les entretiens avec Patrice Meyer-Bisch, chargé par l’Unesco d’une étude qu’il conduit au sein de l’Université de Fribourg sur ces droits polymorphes et
parfois insaisissables. Des travailleurs sociaux, plus curieux que ceux du monde culturel, y perçoivent l’opportunité d’en ré-enchanter un métier que l’évolution sécuritaire des sociétés tente de réduire à des actes sans âme.

En France la loi NOTRE qui réorganise les relations entre l’État central et les « territoires de la République », leur donne, pour la première fois, droit de cité, dans un article entre cent autres. C’est peu, c’est tardif, mais comme point de départ c’est beaucoup. En Belgique, les droits culturels en sont encore à se morfondre sous la mention – constitutionnelle quand même – de « l’épanouissement
culturel soutien indispensable de la dignité humaine ». En 1993, la Constitution belge, après 45 ans, se mettait à l’heure de la Déclaration de 1948 … Peut mieux faire.

Il y a comme une frilosité autour de ces droits : encore récemment c’est sous couvert de médiation culturelle que d’aucuns les découvrent fugacement. Ailleurs on les retrouve dans les propos sur les communs, eux aussi en pleine réflexion. Ils manquent de clarté, il y a autour d’eux comme des élans d’intuition, on y perçoit une promesse de revitalisation des politiques de démocratisation de la
culture et de démocratie culturelle, de changement de paradigme, comme un nouveau mai 68.

On veut en savoir davantage. Un appel, né de formations aux droits culturels données en Auvergne à quelques centaines de travailleurs sociaux et culturels (dont la curiosité grandit), imposait de tenter une autre manière de leur donner plus de consistance, d’en proposer
quelques clés d’analyse et de les appuyer à des cas concrets vécus par les participants. C’est la tentative – modeste – de ce Manuel d’approche des droits culturels.

Une première approche – qui ne craint pas une certaine aridité de propos –, conçue comme accompagnement de formations, d’entretiens, d’échanges et de perspectives.

Paul Biot, membre de Culture & Démocratie, formateur, co-fondateur du théâtre-action

 


Pour aller plus loin :

Jean Michel Lucas, consultant en politiques culturelles, a fait paraître en 2017 aux éditions Territorial, un ouvrage intitulé Les droits culturels – enjeux, débats, expérimentations.
Paul Biot en propose une note de lecture, à découvrir ici.

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